À la Banque de France, nous n’allons pas à la cantine, mais au buffet-restaurant !
Plus régulièrement employée que Restaurant ou Restaurant d’entreprise, c’est l’expression Buffet-restaurant ou Buffet, qui prévaut à la Banque de France. Le premier buffet voit le jour en 1866, à l’initiative d’Antoine Pelletier (restaurateur, après avoir été militaire et chef de train sur la ligne Paris-Lyon). Il propose spontanément ses services pour entreprendre la création et la gestion d’un Buffet, au sein même de la Banque. Son idée est de pouvoir offrir aux employés un service de restauration rapide : « Permettez-moi, Monsieur le Gouverneur, de vous soumettre une idée qui m’est survenue relativement aux nombreux personnel [sic] de la Banque de France, qui par la responsabilité de ses fonctions, est obligé de prendre un repas dans ses bureaux. […] De cette manière, Messieurs les employés trouveraient à vivre à de meilleures conditions et sans avoir à sortir de la Banque ». Le contrat avec Antoine Pelletier, d’abord signé pour 2 ans, est renouvelé jusqu’en 1873.
Malgré les efforts des restaurateurs alentours, pour empêcher la réussite du buffet, son succès est rapidement au rendez-vous. La qualité des produits, la praticité, le gain de temps qu’il apporte et la modicité des prix (plus raisonnables que dans les restaurants à proximité) expliquent cette réussite immédiate. Les faibles coûts des déjeuners se justifient par le caractère non lucratif de l’offre de cantine.
Suite à la cessation de contrat avec Antoine Pelletier en 1873, plusieurs autres gérants particuliers se succèdent, à titre de concessionnaires, jusqu’en 1913. À compter de cette date, les difficultés financières de chacun d’eux (en raison des modestes tarifs de la cantine), conduisent la Banque de France à confier le buffet à des entreprises de restauration. Ce sont Les établissements Duval, puis La Société de gestion d’hôtels et restaurants, qui assurent ce service, jusqu’en 1936. Dans le même temps, la Banque apporte davantage de subventions, en fournissant notamment, les combustibles nécessaires aux cuisines. Par la suite, d’autres révisions budgétaires engendrent, à nouveau, changement d’exploitation du buffet. Jusqu’aux années 1940, le restaurant d’entreprise est, une nouvelle fois, confié à des concessionnaires.
Le 4 avril 1942, une première circulaire ministérielle impose que les cantines d’entreprises et inter-entreprises, soient désormais régies par un comité. Celui-ci, devant être composé de représentants du personnel et de l’entreprise. S’ensuivent, plusieurs révisions de cette nouvelle réglementation, jusqu’à l’ordonnance du 22 février 1945, instituant les comités d’entreprises. Le premier Comité de la Banque de France date de 1946. Cette même année, le buffet sert, chaque jour, environ 2 600 repas, contre environ 800 avant la guerre.
Si le mode d’exploitation du buffet a évolué à travers le temps, sa localisation aussi. Dès 1891, est évoqué un besoin d’agrandissement de l’espace de restauration (implanté au sous-sol de la Banque, du côté de la rue Baillif). Cela, pour donner aux employés, la possibilité d’apporter leur propre repas, et de le faire réchauffer sur place. La réflexion aboutit à l’acquisition, en 1920, du restaurant Le Petit Véfour (rue de Valois), pour y installer le nouveau buffet. Puis, la cantine se tiendra au 9 rue du colonel Driant (qui accueille, aujourd’hui, la direction de la Communication, dont le service des archives !), où les 3e, 4e et 5e étages du bâtiment, seront réservés aux salles de réfectoire. Le 6e étage accueillera, quant à lui, les cuisines. En 1965, l’espace devenant à nouveau insuffisant, un déménagement du restaurant vers l’immeuble Ventadour (site déjà chargé d’histoire !), s’impose.
En effet, l’immeuble Ventadour était initialement un Opéra-Comique. Acheté par la Banque de France en 1891, il accueille successivement divers services, dont celui de la Gestion des titres. L’inauguration du nouvel immeuble de la Banque centrale en 1950, a rendu le site de Ventadour vacant. Une revente de ce dernier est alors envisagée, mais n’aboutira pas. Après plus de 10 ans de travaux de réaménagement, l’immeuble accueille donc, en 1965, les services sociaux, dont la cantine d’entreprise. Elle fournit alors un service sur table de 680 places, un libre-service de 220 places, et trois cafétérias.
C’est après près de 60 ans de service, que le 4 octobre dernier, le restaurant Ventadour a fermé ses portes, pour revenir au siège. L’immeuble va subir, ces prochaines années, une restructuration complète. Il pourra ainsi, accueillir, à nouveau, certains services de la Banque, aujourd’hui localisés en périphérie du siège.
Pour illustrer ce billet, nous vous proposons deux menus datant de 1926. Ils illustrent ainsi la composition des déjeuners d’époque et le budget associé. Un menu complet en 1926 à environ 6 anciens francs équivaut aujourd’hui à un repas à 4,50 euros.