
Marie Curie est l’unique femme célèbre représentée sur un billet français. Elle figure avec son mari sur le billet de 500 francs de la dernière gamme en franc mis en circulation, il y a trente ans, en 1995. Il se sera écoulé plus de vingt ans entre la création d’une première maquette à son effigie et la mise en circulation d’un billet la représentant. La journée internationale des Femmes et filles de science est l’occasion de présenter les réflexions relatives au personnage de Marie Curie comme effigie d’un billet produit par la Banque de France.
À la fin des années 1960, la Banque de France envisage « une évolution vers des techniques nouvelles comportant moins de « fignolages » et davantage de surfaces fondues, à la fois pour des raisons techniques – de façon à rendre les contrefaçons plus difficiles – et artistiques par l’adoption d’un style moins fleuri » (extrait du procès-verbal du Conseil général du 6 novembre 1969, folio 751). Le billet de 500 francs Pascal et les billets qui suivent de 10 francs Berlioz, de 50 francs Quentin de la Tour et de 100 francs Delacroix, tous réalisés par Lucien Fontanarosa, illustrent cette évolution technique et artistique.
Ce même artiste crée les premières maquettes de billets à l’effigie de Marie Curie en 1972 dans la même direction artistique. Cette commande de la Banque de France devait servir de maquette de réserve au cas où le 500 francs Pascal ou un autre billet serait contrefait. Le choix de représentation de Marie Curie n’est pas documenté dans les archives. Son nom n’apparait ainsi dans aucune délibération du Conseil général traitant des personnalités à figurer sur les billets. La première maquette est une coupure de 500 francs qui représente Marie au recto et Pierre Curie au verso. La seconde, dont la valeur faciale est de 100 francs, représente cette fois Marie et Pierre Curie réunis sur chacune des faces du billet.
Plusieurs projets de maquettes ont également été lancés en 1977, probablement pour de la réserve. Bernard Taurelle a ainsi réalisé une maquette représentant Marie Curie dans une composition verticale qui se différencie des maquettes classiques. Ghislaine Castets et Raymond Moretti ont aussi reçu une demande de création de maquette mais aucune des deux n’a été réalisée. Le manque de sources sur ces projets ne nous permet pas de déterminer pourquoi a-t-on demandé ces projets à ces artistes alors que Lucien Fontanarosa avait déjà travaillé sur le sujet ni à quel moment ils ont été abandonnés.
En 1979, afin de pallier l’usage massif du billet de 100 francs, la Banque souhaite créer une coupure de 200 francs. Il n’y avait pas eu de coupures présentant une telle valeur faciale depuis 1848. À l’effigie de ce nouveau billet, deux personnes célèbres sont proposées : Marie Curie et Montesquieu. La maquette de Marie Curie est réalisée par Jacques Combet, de facture assez moderne, et la maquette de Montesquieu est réalisée par Pierrette Lambert, de facture plus classique. Lors du Conseil général du 3 mai 1979, la maquette de Pierrette Lambert est choisie pour des raisons esthétiques.
À la même période, le billet de 10 francs est remplacé par une monnaie sonnante et trébuchante. Une coupure de 20 francs est à l’étude. Il n’existait plus de telle coupure depuis 1942. Pour ce billet, deux personnages célèbres sont à nouveau proposés : Marie Curie et Debussy. Une maquette du 20 francs Curie avait été commandée auprès de la société François-Charles Oberthur Fiduciaire en 1979, mais la Banque de France ne donnera pas suite à la proposition délivrée. Jacques Combet réalisa une version remaniée de sa précédente maquette qui prenait en compte les critiques reçues précédemment. Lors du conseil général du 18 octobre 1979, la maquette Debussy créée par Bernard Taurelle l’emporte sur la proposition de Combet. Le Gouverneur Bernard Clappier juge peu judicieux de représenter pour la première fois une femme célèbre sur « une coupure d’une valeur faciale aussi modeste ».
Ce n’est qu’en 1985, lorsqu’on conçoit la nouvelle gamme franc – qui sera aussi la dernière – que Marie Curie est de nouveau évoquée. Une maquette d’un billet de 500 francs est réalisée en 1988 par Pierrette Lambert, puis une autre en 1989 par Roger Pfund qui sera sélectionnée. Le billet de 500 francs Pierre et Marie Curie circulera finalement en 1995, année de leur entrée au Panthéon. Le 31 janvier dernier, la Banque centrale européenne a officialisé les motifs retenus pour les deux thèmes en lice pour les futurs billets en euro. Au sein de la thématique « La culture européenne », Marie Curie pourrait incarner les universités et les écoles sur le billet de 20 euros.