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Quand Vidocq pourchasse les faussaires

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Dès sa création, la Banque de France décide de rembourser systématiquement les contrefaçons de ses billets. Il s'agit de ne pas discréditer la confiance qui s'installe dans le public vis-à-vis de ceux-ci. La moindre inquiétude pourrait en effet conduire le public à demander l'échange des coupures en espèces sonnantes et trébuchantes et mener ainsi l'Institut d'émission à la banqueroute. Dans le même temps, la Banque de France s'active pour traquer les faussaires avec la collaboration de la police et cela en toute discrétion afin de ne pas ébruiter les affaires. À cette époque, les billets en circulation présentent des valeurs faciales de 500 et 1000 francs, ce qui est très élevé au regard du niveau de vie d'une grande partie de la population. Un ouvrier spécialisé gagne environ 3 francs par jour et le salaire annuel d'un garçon de recette de la Banque est de 1200 francs. Les billets circulent donc peu, ce qui facilite les enquêtes des officiers de police.

Le 21 juillet 1812, la Banque de France reçoit un faux billet de 1000 francs dessiné à la plume. D'autres suivent, versés pour certains par des maisons de jeu. L'enquête dans ces maisons permet d'identifier l'auteur de ces contrefaçons. Il s'agit de Nicolas Allais, anciennement peintre de Monsieur le duc de Penthièvre et notamment chargé de l'entretien de sa collection de tableaux. Il est arrêté le 24 avril 1813 et on découvre chez lui un faux billet de 1000 francs en préparation, ce qui le pousse à avouer son crime. La Banque de France doit rembourser au total trois billets de 500 francs et 31 billets de 1000 francs qui sont présentés à ses guichets après l'arrestation du dessinateur et lui sont attribués.

Nicolas Allais n'est pas mis en jugement car on craint que son affaire n'altère la confiance dans les billets. Il demeure incarcéré au château de Saumur jusqu'à la Restauration où, considéré comme détenu politique, il est libéré. Mais alors que de nouvelles contrefaçons à la plume font leur apparition en 1818, il est recherché à Nantes par Vidocq qui le ramène à Paris et le fait interner. Tandis que l'on discute de sa mise en jugement pour la première affaire car aucune charge nouvelle n'a été découverte contre lui, Nicolas Allais, âgé de 72 ans, parvient à s'évader du dépôt de la préfecture de police. Il ne sera jamais retrouvé malgré l'envoi de son signalement par le ministère de la Police générale dans tous les départements.

Le chef de bureau de François Vidocq présente à la Banque de France pour remboursement le mémoire des frais de l'arrestation d'Allais à Nantes et de son rapatriement à Paris. Outre les dépenses de transport, d'hôtellerie et de bouche, ce mémoire comprend quelques extras comme une bouteille d'eau de vie et une nouvelle gratification de près de 300 francs accordée à la police qui complète, maigrement, celle de 6000 francs qui avait été versée lors de sa première arrestation en 1813.